Lecture au Faubourg : quand des Afeviens rencontrent des chercheurs…

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Depuis 2020, un groupe de salariés de l’Afev participe au dispositif Lecture au Faubourg, animé par le cabinet Temps Commun. Une expérience qui leur permet d’échanger avec des chercheurs et essayistes, mais aussi avec d’autres jeunes engagés sous d’autres formes, et a récemment donné lieu à un "portrait de groupe" très riche en enseignements.

De manière régulière depuis 2020, des salariés de l’Afev participent, aux côtés des jeunes membres des différentes promotions du « think-tank de jeunes décideurs d’avenir » Social Demain (mis en place par le cabinet Temps Commun), à des visioconférences « autour d’essais importants pour la compréhension du monde contemporain ». Ceci, selon Denis Maillard de Temps Commun, « de permettre à une sorte de "promo" de membres de l’encadrement intermédiaire de l’Afev de faire un pas de côté. »

Rencontres variées, thématiques ouvertes…

C’est le programme Lecture au Faubourg, qui leur a permis d’échanger en 2020 avec le politologue Jérôme Fourquet (L’archipel français, naissance d’une nation multiple et divisée, Le Seuil), les journalistes Jean-Marie Godard (Bienvenue aux urgences, Fayard) et Jean-Laurent Cassely (La France qui vient, L’Aube) [LIEN : https://lab-afev.org/labafev/afev-visio-conference-avec-le-journaliste-jean-laurent-cassely] ou encore l’écrivain Marc Weitzmann (un temps pour haïr, Grasset). L’année suivante avec le Directeur de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) Didier Leschi (Ce grand dérangement, l’immigration en face, Gallimard), l’anlyste politique Jérôme Sainte-Marie (Bloc contre bloc : la dynamique du macronisme, Editions du Cerf) et le sociologue Julien Damon (Qui dort dehors ?, L’Aube).

En 2022, Lecture au Faubourg a reçu, de la même manière, les chercheurs Jérémie Peltier (La fête est finie ?, L’Observatoire), Luc Rouban (Les raisons de la défiance Presses de Sciences Po) et le consultant Adrien Dubasquet (Le véganisme, une idéologie du XXIème siècle, L’Aube). Cette année, enfin, se sont succédé face à cette agora  - en partie afevienne - l’autrice Laetitia Vitaud (Pour en finir avec la productivité, critique féministe d’une notion-phare de l’économie, Payot) et les chercheurs Nedjib Sidi Moussa (Histoire algérienne de la France, PUF) puis Thierry Pech (Le parlement des citoyens, Le Seuil).

A ce sujet, Denis Maillard se souvient « qu’au départ, les gens de l’Afev prenaient très peu la parole [au cours de ces rencontres]. C’était surtout ceux de Social Demain qui intervenaient. » Mais au fur et à mesure, « cette retenue, cette forme d’attentisme » a décliné : « Aujourd’hui, les gens de l’Afev sont assez assidus, présents dans ce dispositif. Ils n’hésitent pas à prendre la parole, demandent les livres en amont, les lisent puis interagissent. » Pour lui, c’est aussi, sans doute, « parce que le groupe a été reconnu comme tel, aussi, par les dirigeants de l’Afev. »

… et portrait de groupe !

Par ailleurs, au-delà du dispositif Social Demain, le cabinet Temps Commun de Denis Maillard et Philippe Campinchi anime depuis des années des rencontres avec des groupes de professionnels (des ressources humaines par exemple), avec dans sa boîte à outils ce qu’il qualifie de « portraits de groupe ». C’est donc à ce jeu original que se sont prêtés quinze salariés de l’Afev ayant participé au programme - un groupe dont la moyenne d’âge s’élève à 29 ans, soit « à peine trentenaire, avec une personne beaucoup plus jeune et une autre plus âgée. »

A ces "Afeviens" étaient posées une poignée de questions variées, qui ont permis de dresser ce fameux « portrait de groupe » et surtout de tirer quelques enseignements. Sur les prénoms, d’abord, ou les grands-mères – ce qui livre un instantané familial des trajectoires à la fois géographiques et sociales. Ici, des familles rarement franciliennes à l’origine, mais issues de tout l’Hexagone voire d’ailleurs (Algérie, Maroc, Russie, Pologne, Allemagne…). Par ailleurs, sur 28 grands-mères, 9 seulement étaient « de réelles femmes au foyer sans activité autre que celle d’élever de nombreux enfants et de s’occuper de la maison. » Les autres aidaient à la ferme, dans le commerce ou l’entreprise familiale, exerçaient de « petits boulots » ou – pour la moitié d’entre elles – étaient salariées à temps plein, à des postes « dévolus à la classe moyenne inférieure. » On note ici, entre elles et les jeunes interrogés, une évidente « mobilité ascendante. »

Pour ces derniers, l’engagement (à l’Afev) s’ancre souvent dans une histoire familiale longue, et fait « à la fois [d’eux] des professionnels reconnus (…), [leur] offre une assise voire une stabilité après avoir parfois tâtonné au départ et [leur] permet aussi d’exercer avec conviction. » Ce que les animateurs ont résumé d’une « formule choc : vous êtes révolutionnaires dans vos têtes et réformistes dans vos actes. »

Des salariés engagés

Enfin, concernant leur vision de l’avenir, les jeunes cadres de l’Afev interrogés se caractérisent de trois façons. D’abord, par un « continuum de l’utilité sociale », une recherche de sens dans le fait de se rendre utile à la société. Ensuite, une « focalisation sur le bonheur local et privé » : faible appétence pour une migration vers l’international, repli espéré en dehors de la métropole… Et enfin, « une envie d’agir avant tout professionnellement », avec un sentiment positif concernant leur activité au sein de l’association (et plus globalement l’action de celle-ci sur la société), plutôt que politiquement – via l’occupation d’un poste d’élu par exemple. Ainsi, ont conclu les auteurs de ce portrait de groupe, « [leur] vie est politisée, [leur] travail est politique, mais [ils ne veulent] pas (ou presque) toucher à la politique. »

Interrogé à ce sujet, Denis Maillard précise : « Les gens de l’Afev n’ont pas du tout le même profil que ceux de Social Demain. Ces derniers sont très engagés dans le "faire", ont créé des structures par eux-mêmes, sont très actifs dans leur engagement… » A contrario, « ceux de l’Afev ont majoritairement mis un peu de temps à trouver ce qu’ils voulaient faire, et sont aujourd’hui des salariés – mais à travers ce travail, ils sont extrêmement engagés. » Ainsi, « dans leurs idées voire dans leur vie personnelle, ils ont des visions, des convictions et des actions relativement affirmées, et trouvent dans leur métier - d’encadrement intermédiaire - à l’Afev un sens, une forme d’épanouissement en accord avec leurs valeurs. Notamment parce qu’ils ont à cœur d’être proches du terrain. »


François Perrin

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