De l’innovation pour les quartiers populaires !

10 ans après le drame de Clichy-sous-Bois et les événements qui ont suivi, où en sommes-nous ? Malgré la réussite globale de la politique de rénovation urbaine, le décrochage social, économique et citoyen des quartiers prioritaires s’est encore accentué. Le pouvoir d’achat y reste toujours deux fois moins important que dans le reste du pays, la population en-dessous du seuil de pauvreté y est passée de 28 à 38 %, le taux de chômage de 19 à 23 %[1]  et le décrochage scolaire y reste très important. La réalité sociale n’a hélas pas accompagné l’évolution réelle du bâti.

  Alors, soit on se lamente - et de fait on accepte ce décrochage et la perte de ces quartiers pour la République -, soit - et c’est ce que nous défendons -, nous en faisons un enjeu de développement  pour notre pays. Car, ne nous y trompons pas, les problèmes auxquels nous sommes confrontés dans ces quartiers ne sont pas différents du reste du territoire, il n’y a pas de spécificité propre, ils sont juste plus importants sur des zones où l’on a fait le choix politique de la concentration. Plus d’exclusion économique, sociale, politique, géographique et ethnique, et surtout plus de discriminations qu’ailleurs ! Et cet échec n’impacte pas simplement ceux qui y vivent, mais représente un coût énorme pour notre pays qui est aujourd’hui estimé, par certains économistes, à 10 milliards d’euros, ce qui représente une vraie croissance confisquée !   [caption id="attachment_1988" align="alignright" width="250"]message-de-la-rue-JPM-je-m-exprime- JPM, street artist[/caption] Pourtant, nous savons qu’ici - et peut-être même plus qu’ailleurs -, l’envie de vivre à égalité de droits, de participer pleinement à la vie de notre pays est présente. Dans ces quartiers périphériques, il y a deux fois plus de projets de création d’entreprises que sur le reste du territoire. Nous disposons d’une jeunesse dynamique, diplômée, qualifiée et riche d’origines multiples, qui ne demande qu’à participer au rayonnement de notre pays sur la scène internationale ce qui constitue un vrai atout dans cette société ouverte et globalisée.   Dans ce contexte, l’Afev et Simplon entrent ensemble au Conseil National de Villes. Nous y porterons nos envies et nos espoirs, en nous appuyant sur nos expériences respectives. Car, tous les jours, nos engagés inventent de nouvelles façons de vivre et de faire ensemble démontrant un peu partout sur le territoire que la solidarité, le partage, la confiance et la bienveillance sont des leviers puissants contre toutes les relégations. Si ces quartiers subissent beaucoup de fractures, il reste néanmoins deux domaines qui échappent à la règle : la solidarité et le numérique ! Ces jeunes des quartiers, et plus globalement les habitants en âge de travailler, sont les déshérités de l'économie industrielle du 20ème siècle. Faisons aujourd’hui, avec eux, le pari de l’accompagnement numérique. Dans une économie de la connaissance, aucun jeune ne doit sortir de l'école sans diplôme, permettons à ces habitants de développer les compétences transversales nécessaires dans notre économie moderne. [caption id="attachment_2009" align="alignright" width="250"]La Casemate à Grenoble ©Pierre Borghi La Casemate à Grenoble ©Pierre Borghi[/caption] La ségrégation spatiale reste réelle pour ce qui est de l'implantation des nouveaux espaces collaboratifs générateurs de créativité et d'emploi. Développons les tiers lieux au sein de ces quartiers, les espaces de coworking, les fab labs... Inventons et initions la création de lieux nouveaux, qui soient aussi des HUBs de rencontres et d’engagements entre entrepreneurs, acteurs associatifs, étudiants et habitants de ces quartiers.   Dans cette période si violente et anxiogène de rejet de l’altérité et d’opposition des uns contre les autres, nous voulons faire valoir l’intelligence collective et l’innovation technologique pour essayer de comprendre la complexité de ce monde qui change si vite et qui, selon le philosophe Michel Serres, vit par le numérique sa troisième révolution après l’invention de l’écriture et de l’imprimerie. Nous savons qu’il faut inverser le regard sur ces quartiers, que le multiculturalisme est une chance et un atout, qu’il faut reconnaître les compétences de cette population pleine d’envies et d’énergies, qu’il nous faut ici, comme ailleurs, conserver une dynamique positive.   Ce pari concret que nous faisons, nous le voulons joyeux, apaisé et inventif et surtout nous le ferons avec tous ces acteurs des quartiers populaires, convaincus que la France de demain se construit dans ces quartiers.   [1] Source : Insee    Thibault Renaudin, secrétaire général de l'Afev Frédéric Bardeau, président et co-fondateur de Simplon.co Crédit photo en Une : Débora de Oliveira 

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