Face à tous les problèmes, scandales et événements qui émaillent sans cesse l'actualité européenne (secret des affaires, accueil de réfugiés, dette, Brexit, retrait de l'UE de l'Islande et de la Suisse), je ressens le besoin de me rattacher à du concret, qu'il s'agisse d'idées, de valeurs, de raisons ou de toute autre chose permettant de décider, face à un énième problème posé par l'Union et sa grosse machine à 28 pays, si oui ou non l'Europe mérite encore d'exister.
L'Europe est et restera un moyen d'éviter une nouvelle guerre (qu'elle soit armée, économique ou culturelle) entre nos pays. C'est avec ce but premier qu'elle est née et ce seul but suffit à justifier son existence aujourd'hui comme demain. A l'image de la COP 21, qui permet le rassemblement de toutes les nations du Monde autour de la même table, le projet européen, en réussissant à rassembler de nombreux pays autour d'un idéal partagé, demeure fidèle à quelque chose qui nous élève en tant qu'humains, peuples et pays. En soi, elle représente déjà une réussite que nous pourrions regretter le jour où, par exigence de résultats à court-terme, nous déciderons de faire disparaître ce genre de rassemblements. La réussite des mesures concrètes prises par les pays européens est bien sûr importante, mais l'intention initiale du projet global, face à l'échec de telle ou telle mesure, doit toujours être protégée, défendue, et non balayée comme elle a tendance à l'être de nos jours. Gardons toujours l'intention initiale et tâchons de trouver les moyens de la traduire en idées, en actes qui permettent à tous les européens d'y adhérer et de s'y retrouver. Sans elle, aucun espoir ne peut survivre. Aucune déception non plus, bien sûr, mais aucun espoir, surtout... Ne l'oublions jamais. C'est toujours ainsi que j'ai compris (ou voulu comprendre, par optimisme) le résultat des référendums suivants : refus du nouveau traité européen en 2005 en France, et Brexit en 2016. Ce n'est pas un rejet de l'Europe, mais plutôt du projet politique actuel de l'Union Européenne.L'importance du voyage
Je suis toujours gêné par l'idée d'Europe, d'un si vaste territoire, si ses habitants/citoyens ne peuvent le parcourir eux-mêmes. Je me rappelle avoir organisé, avec l'Afev de Lille, un voyage découverte de la mer pour des collégiens qui ne l'avaient encore jamais vue (à une heure de route de Lille). L'Europe, pour ces enfants, restera distante (physiquement comme mentalement) : ce n'est pas leur territoire. Je ne peux donc pas envisager l'Europe comme un espace commun, partagé, sans une politique forte de transport en faveur de ses habitants, en particulier de ses adolescents et jeunes adultes. Une politique forte, ce ne sont pas seulement plus de trains sur les rails (on en trouve déjà un grand nombre qui restent vides !), c'est aussi et surtout une sensibilisation au voyage, de l'information, des projets, dispositifs et manifestations qui encouragent le plus grand nombre à prendre le train et découvrir des lieux et des personnes jusqu'ici inconnus. [caption id="attachment_2666" align="alignleft" width="441"]
Les contours et limites de l'Europe
Un ami grec me faisait un jour remarquer que Marseille est plus méditerranéenne qu'européenne. Comment concilier l'Europe et le reste du monde ? Cette entité doit-elle s'agrandir ou se réduire ? Et pour quelles raisons ? Au nom d'une culture, d'une situation économique, d'une religion, de ressources naturelles ? La question peut se poser géographiquement : l'intégration des pays des Balkans (Macédoine, Monténégro, Serbie, Albanie, Bosnie-Herzégovine, Kosovo) semble sur ce point plus évidente que celle de la Turquie. Mais alors que dire de Chypre, qui figure dans l'Union Européenne alors qu'elle se situe plus à l'Est qu'Istanbul ? Et que penser de l'Islande, qui vient de retirer sa candidature à l'Union Européenne en mars 2015? Une île au beau milieu de l'Océan Atlantique : doit-elle devenir européenne, rester indépendante ou devenir le 52ème Etat des USA ? Doit-on mesurer les kilomètres par rapport à Bruxelles et décider en fonction de cela la possible appartenance d'un pays à l'Union Européenne ? Par ailleurs, être en Europe et appartenir à l'Union Européenne, quelle est la différence ? Certains pays, au sein même de l'Europe "géographique", n'ont que des accords et traités en tous genres (accords bilatéraux, union douanière comprenant l'UE, Andorre, Saint-Marin, Monaco et la Turquie, espace Shengen, etc). [caption id="attachment_2673" align="alignright" width="462"]
Des valeurs à défendre
Or l'Europe a des valeurs à défendre, et doit dépasser la seule comptabilité des avantages ou inconvénients financiers correspondant à une entrée ou à une sortie en son sein : l'Europe doit porter haut ses valeurs, non pour les imposer, mais pour "éclairer", rendre disponible au plus grand nombre d'habitants de la planète un idéal partagé par ses citoyens. Le progrès arrive en confrontant des visions claires. L'Europe ne me semble pas claire, confuse, et donc, par conséquence, vulnérable. Sa force ne sera pas dans sa "monoculture", mais dans ses cultures multiples réunies autour de valeurs partagées s'exprimant différemment : solidarités, libertés et sécurités, cultures et éducations, qualités de vie. Pourquoi ne pas créer une banque européenne, présente dans tous les pays, répondant par exemple au nom d'Euroka, et à laquelle tous les citoyens pourraient adhérer? Euroka, afin d'unir l'Euro à l'Eureka du célèbre savant de la Grande Grèce d'autrefois : Archimède. Fonder ainsi une banque créatrice de liens nouveaux entre les Européens, ne pratiquant pas la spéculation financière et n'utilisant pas de produits financiers complexes et opaques, au service d'une économie responsable, humainement autant qu'écologiquement. L'Europe ne pourra pas survivre avec seulement l'argument, aussi noble soit-il, d'éviter la guerre entre ses pays. Il faut un objectif "positif" vers lequel tendre. Les fondateurs de l'Europe l'avaient bien compris en créant une Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA), consistant à mutualiser la production dans un marché commun. Mais ce projet a disparu depuis 2002, et seul un projet commun basé sur le nucléaire (Euratom) demeure à ce jour encore opérant, en matière énergétique. L'Europe doit prendre position sur ce sujet, développer un projet fédérateur incluant les nouvelles technologies (solaires, filière bois, nanotechnologies, etc...). L'énergie me semble un bien commun de l'humanité et l'Europe pourrait être à la tête d'une grande coalition mondiale sur le sujet. Comme le disait Elisabeth Guigou dans le numéro 111 du journal "Le 1" : "Il faut bâtir une Europe à plusieurs cercles" (...) Un projet unificateur serait la Communauté de l'Energie, qui porterait une politique commune aux confluents de l'économie, des nouvelles technologies, du climat et des relations extérieures."Prendre le temps de réfléchir
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