Colloque KAPS Lille 1/4
Le 16 janvier, au Gymnase de Lille, se tenait une rencontre nationale de l'Afev consacrée à "la colocation solidaire – Une nouvelle façon d'habiter et d'impliquer les étudiants dans le territoire." L'occasion de donner la parole à des élus, chercheurs, responsables de l'association, mais avant tout aux "kapseurs" eux-mêmes, étudiants impliqués dans ce mode original de colocation, venus de toute la France. Retour sur les séances d'introduction et de conclusion, cadre général des échanges.
Première intervenante de la séance introductive, Estelle Rodes, adjointe à la Maire de Lille, en charge de la Politique du Logement, a été présentée par l'animateur Claude Costechareyre, citant là une kapseuse interrogée la veille, comme « une ambassadrice de l'Afev, et en particulier de la colocation. » Selon elle, « les Kaps ont un impact immense, quel que soit le nombre effectif de kapseurs. C'est avant tout le mode de faire, la manière de travailler ensemble, l'état d'esprit que cela insuffle sur le quartier, sur les étudiants », qui font la différence. En effet, « les Kaps, ce sont des jeunes [800 en septembre prochain, ndlr] qui choisissent de s'engager à la fois pour le quartier, pour des territoires où tout ne se passe pas forcément bien et pour les habitants dont ils deviennent les voisins – ce qui fait toute la différence. » L'intérêt pour une responsable politique ? « Cela donne envie à des habitants de faire ensemble, de faire des choses, dans des résidences où les gens ne se parlaient plus forcément, où certains avaient envie de refermer leur porte au plus vite. »
Une déclaration qui a poussé Christophe Paris, Directeur général de l'Afev, à indiquer en souriant : « Estelle est capable de parler des kaps et de notre association mieux que nous ! » Et de rappeler que « l'une des premières élues auxquelles nous nous sommes adressés, il y a huit ans, quand nous avons commencé à tenter de "piquer l'idée" des kots-à-projets de Louvain-la-Neuve, avec Nicolas Delesque ici présent, c'est précisément cette même Estelle. » Un échange initial qui les a convaincus de poursuivre leurs efforts pour mettre en place les Kaps, tant « notre interlocutrice avait été capable de saisir tout ce que cela pouvait apporter non seulement pour le logement, mais en matière de transformation sociale au sens large. » Pour lui, désormais, « si nous avons réussi à penser cette idée-là et à la faire vivre, à la développer sur un certaine nombre de territoires, il s'agit, à l'occasion de ce colloque, d'ouvrir une nouvelle phase de la colocation solidaire. »
Ensemble, des défis à relever
Constatant la grande variété d'intervenants, et les origines géographiques diverses des participants présents dans la salle, il a indiqué : « Les Kaps, c'est avant tout cela : une capacité à pouvoir faire les choses "en vrai", à incarner des actions au-delà des postures. » Deux défis, aujourd'hui : d'abord, « comment généraliser le modèle Kaps, le construire avec les villes, les bailleurs, les aménageurs, les partenaires, pour passer par exemple de 800 kapseurs aujourd'hui à 8000 à moyen terme ? » Ensuite, dans la mesure où « les kapseurs sont globalement en train d'utiliser les kaps pour lutter contre les inégalités éducatives, mais aussi pour faire de l'éco-citoyenneté, ce que nous n'avions pas forcément anticipé », comment « capitaliser sur cette expérience pour créer les prémisses de ce que seront les Kaps de demain ? »
Reprenant la parole pour présenter le programme de la journée, Claude Costechareyre a synthétisé les propos en estimant qu'il s'agirait pendant cette journée de « faire le brouillon d'une nouvelle page à écrire pour les Kaps. » Ceci au moyen de plusieurs temps-forts : une rétrospective historique de la mise en place des Kaps ; des pistes d'amélioration tracées par la psychosociologue Joëlle Bordet ; un retour sur l'histoire collective entre kapseurs, quartiers, universités, bailleurs et institutions ; une table-ronde dédiée à la parole des kapseurs eux-mêmes. « Ils nous importe, a-t-il conclu, de porter votre parole, ensemble. »
Une conclusion optimiste
Dans les faits, la journée fut riche à la fois en enseignements et en liberté de parole, grâce à un modérateur particulièrement en verve. Ce qui a poussé en fin de journée Jérôme Sturla, Directeur du développement urbain à l'Afev, à remercier le « fouet qui a permis à la mayonnaise de prendre », à savoir Claude Costechareyre, ainsi que, sous des applaudissements fournis, Claire Helly, responsable des Kaps pour Lille, ainsi que Cédric Laigle, délégué régional des Hauts-de-France. L'occasion aussi de constater « la très grande richesse des débats, marqués par une vive authenticité, et alimentés par la présence de nombreux kapseurs » venus de toute la France. Les enseignements à tirer de cette journée sont pour lui nombreux : « pour créer les conditions de réussite d'un tel projet, il faut que l'ensemble des partenaires puissent tirer dans le même sens, se coordonner », et « situer cette histoire dans l'histoire plus large de l'association, depuis les premières expérimentations de Kaps jusqu'à la phase actuelle d'implantation », de renforcement.
Selon Jérôme Sturla, l'expérience des Kaps - « objet urbain transitionnel » selon Joëlle Bordet -, pose « la question cruciale de comment faire cité », en dépassant la thématique du bâtir « pour aborder celle de l'habitat, qui pose les jalons d'une certaine forme d'urbanité », et en veillant à « rester dans le coup grâce aux étudiants », c'est-à-dire les premiers concernés - dont on oublie souvent « qu'ils sont avant tout, avant même de s'engager ici ou là, des citoyens. » Ce qui permettra de « construire une ville qui ne doit pas être prédéterminée à l'avance, une ville vivante, où les expérimentations restent possibles. Les kapseurs, à ce titre, participent pleinement de ce mouvement. »
Lire la suite : "Etat des lieux des Kaps avec Joëlle Bordet"
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