Le 1er mars dernier, pendant sa visite d'un centre de formation aux métiers industriels à Stains (93), le Président de la République a fait preuve d'un net volontarisme concernant le mentorat en France. Son objectif : faire passer le nombre de jeunes accompagnés de 30 000 actuellement à 100 000 fin 2021, et 200 000 fin 2022. Pour cela, le Gouvernement lance le plan "1 jeune 1 mentor” afin de soutenir le développement du mentorat en France, co-contruit avec les associations du Collectif Mentorat.
Retour sur cette annonce, particulièrement encourageante pour le Collectif Mentorat, avec Christophe Paris, directeur général de l'Afev.
Lab'Afev : En quoi cette annonce présidentielle constitue-t-elle un événement inédit à vos yeux ?
Christophe Paris : C'est la première fois qu'un Président de la République, en France, s'empare de la problématique du mentorat, et souhaite l'intégrer dans les politiques publiques. C'est un acte extrêmement important, l'aboutissement d'un travail très fortement porté par la société civile. Parce ce que dans notre pays, le mentorat reste une action qui est encore assez peu connue, peu repérée, même si elle bénéficie d'une visibilité croissante depuis quelques années. Là, cette position d'Emmanuel Macron agit comme un révélateur de l'ampleur prise par cette pratique en France, ce qui ouvre de nouvelles perspectives. Aujourd'hui, chaque année, 30 000 mentors (lycéens, étudiants, salariés, retraités) accompagnent 30 000 mentorés (de l'école maternelle à l'insertion, et donc de la PMI à la PME !), selon un principe simple : un bénévole accompagne dans son parcours un enfant ou un jeune, de façon transversale, en s'adaptant aux besoins spécifiques de ce dernier. C'est l'idée de cheminer ensemble, dans un temps un peu long (au moins quelques mois), le tout reposant sur des structures professionnelles...Des structures qui, depuis le temps, ont renforcé leur expertise...
C'est effectivement un métier, et le mentorat repose sur des structures dont certaines font cela depuis des décennies ! On n'est pas ici sur la création d'un dispositif ex nihilo, mais bien sur l'idée de s'appuyer sur ce qui existe déjà – et qui est peu visible pour le public – pour lui donner une nouvelle dimension. Aujourd'hui, si cet objectif de 100 000 puis 200 000 annoncé par le Président de la République est ambitieux mais néanmoins atteignable, c'est parce que ces structures – réunies au sein du Collectif Mentorat – disposent aujourd'hui d'un recul, d'une expérience, de compétences et d'outils... et sont désormais prêtes, préparées, à passer à l'échelle.Quelles relations se sont tissées entre le Collectif mentorat et les pouvoirs publics pour en arriver à une telle annonce ?
Depuis la première réunion de septembre 2019, entre le Secrétaire d’État à la jeunesse et le Collectif mentorat, il y a eu un échange permanent avec Gabriel Attal, puis Sarah El Haïry qui lui a succédé à ce poste - mais aussi avec le Haut-Commissaire à l'engagement des jeunes et des entreprises Thibaut Guilluy -, pour construire un Plan mentorat qu'il s'agit désormais de mettre en place concrètement. Le fait que l’État souhaite co-construire cette nouvelle politique avec les acteurs du mentorat, c'est vraiment un élément qui nous semble à la fois extrêmement intéressant en termes de construction de politique publique et un vrai gage de réussite du Plan. L’État prend ici en compte l'expertise développée au fil des années par les acteurs, bien conscient que la gestion du mentorat, ça ne s'improvise pas ! Processus de recrutement, de formation, "matching" entre mentors et mentorés, mise à dispositions d'outils... Tout ceci s'appuie sur une expertise professionnelle, à laquelle aujourd'hui en France des centaines de salariés se consacrent quotidiennement. La logique privilégiée par les pouvoirs publics est ici horizontale et transversale, quand de nombreux plans présentent plutôt une approche verticale et centrée sur un seul sujet (emploi, logement, formation...). C'est une bonne nouvelle. Ainsi, le mentorat peut devenir un nouvel outil pour compléter les politiques publiques existantes, et en particulier le plan « 1 jeune 1 solution ». Propos recueillis par François PerrinPartager cet article