Les 14 et 15 octobre 2015, le Centre de civilisation française et d’études francophones (CCFEF) de l’université de Varsovie organisait une conférence sur « Les nouvelles générations porteuses des capitales de demain ». L’occasion d’interroger clairement le rôle des jeunes générations, et notamment des étudiants, dans l’émergence de la « ville intelligente » et de ces effets sur les inégalités.
Le phénomène de « smart city » est le sujet de bien des projets dans les métropoles européennes. Il est censé bouleverser les usages et les codes des habitants qui résident ou travaillent au cœur des grands ensembles urbains.
Repérer les initiatives locales
Pour mieux appréhender ces mutations, une mission interdisciplinaire proposée par la ville de Varsovie à sa principale université était au cœur des interventions de cette conférence. Le projet vise à impliquer des étudiants-chercheurs pour qu’ils repèrent et référencent, par de l’observation participative, les initiatives locales mises en œuvre par des catégories sociales dites « créatives ». Celles-ci contribuent au développement de la métropole et façonnent son identité grâce aux images, styles de vie ou innovations se diffusant à partir, notamment, d’activités culturelles ou de modes de vie urbain qui relèvent souvent de la nouvelle économie. Ceux-ci reposent de plus en plus sur l’utilisation des technologies numériques et favorisent l’émergence de la fameuse « smart city » ou « ville intelligente ».Le monde merveilleux des « smart cities »
Mais si la ville intelligente suscite des interactivités et des interactions d’un type nouveau, qui peuvent être sources d’inspiration pour les décideurs publics, elle peut aussi générer ou amplifier des fractures sociales. C’est le sens de la contribution de l’Afev à cette conférence. En effet, nombre d’interventions laissaient penser que dans les métropoles les individus sont tous libres, autonomes et dotés d’un formidable potentiel créatif. De ce fait nous vivrions, désormais, dans le monde merveilleux de la société de la connaissance avec, comme nouvel icône, les smart cities. Cette vision de la ville contemporaine mérite d’être nuancée pour ne pas occulter le fait que des pans entiers de la population, singulièrement une frange importante de la jeunesse, sont déjà ou risquent d’être exclus de ces mutations qui se structurent à partir de l’économie circulaire, la société du partage, le coworking, les démarches participatives...La nécessité de nouer des nouvelles alliances
Ces dynamiques sont réservées à ceux qui en maîtrisent les codes et les usages. Par exemple, les espaces ressources qui relèvent des tiers-lieux sont souvent concentrés au cœur de métropoles, elles-mêmes connectées entre elles. Face à ces nouvelles inégalités, il est nécessaire d’innover dans un contexte où les politiques d’intervention économique et sociale se territorialisent en devenant de plus en plus horizontales. Ceci implique que des corps intermédiaires en mutation nouent de nouvelles alliances entre les collectivités publiques, les établissements d’enseignement supérieur et le monde économique. Les publics en difficultés doivent bénéficier de ce cercle vertueux qui mixe et mobilise des ressources à l’échelle d’un territoire. Pour cela, les finalités de l’action publique et associative doivent être éducatives mais aussi à visée d’insertion professionnelle. La smart city doit, certes, profiter au mieux à ceux qui en maitrisent déjà les codes et les usages mais doit aussi intégrer à cette dynamique des populations et des territoires pour lesquels cette réalité est soit inconnue, soit inaccessible en l’état. Jérôme Sturla Photo : université de Varsovie - crédit : JSPartager cet article