Le 23 septembre dernier, en l'Auditorium du journal Le Monde, l'Afev et ses partenaires organisaient la 13ème édition de la Journée du refus de l'échec scolaire (JRES), diffusée cette année en direct et en ligne pour respecter les conditions sanitaires du moment. Celle-ci militait - sous le titre « Ensemble pour le raccrochage scolaire » - pour trouver des solutions à la crise éducative et la hausse des inégalités scolaires, après un confinement problématique et une rentrée particulière à plus d'un titre. A la suite de son Ministre Jean-Michel Blanquer, présent les années précédentes, c'est cette année Nathalie Élimas, récemment nommée au poste nouvellement créé de Secrétaire d’État chargée de l’Éducation prioritaire, qui a pris la parole pour ouvrir la conférence.
Sa présence témoignait, selon Christophe Paris, Directeur général de l'Afev, « de l'importance qu'accorde le Ministère [de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports, ndlr] à l'action de ceux qui sont engagés à ses côtés pour œuvrer à la réussite de tous les élèves ». Et ce, au sortir d'une « crise sanitaire qui s'est doublée d'une crise éducative pendant le confinement, au cours duquel la continuité éducative a été souvent très difficile à assurer – et même inexistante pour des enfants et des jeunes qui étaient déjà les plus fragilisés. » Ainsi, la Secrétaire d’État chargée de l’Éducation prioritaire Nathalie Élimas a pu s'adresser en discours inaugural à ceux que Christophe Paris avait désignés comme « des acteurs, dans la salle ou derrière les écrans, qui sont à vos côtés, à côté des enfants et des familles, pour relever le défi qui s'offre à nous. »
Poursuite et amplification
S'affirmant d'entrée « très touchée » d'y avoir été conviée, elle a remercié « l'Afev, partenaire institutionnel du Ministère. » Selon elle, cette journée « prend un sens tout particulier face à la crise sanitaire sans précédent que nous connaissons depuis plusieurs mois, et qui a malheureusement impacté en premier lieu les élèves les plus fragiles et leurs familles. » A ce titre, « la création pour la première fois d'un Secrétariat d’État en charge de l’Éducation prioritaire est un signal fort en faveur de l'égalité des chances », qu'elle est « particulièrement honorée » d'incarner. Deux objectifs clairs à son action : « élévation du niveau général des élèves et lutte contre les inégalités sociales. » Pour ce faire, il s'agit « avant tout de garantir l'acquisition des savoirs fondamentaux (lire, écrire, compter et respecter autrui), tout en assurant la personnalisation et la progressivité du parcours de chaque élève, de chaque enfant. »
Pour ce faire, Nathalie Élimas s'est déclarée décidée à « s'employer à poursuivre, et même à amplifier le travail formidable engagé depuis le début du quinquennat » : dédoublement des classes de CP et de CE1, puis de grande section de maternelle en éducation prioritaire (300 000 élèves concernés cette année) ; mise en place progressive du plafonnement des classes à 24 élèves en CP et en CE1 ; obligation d'instruction dès l'âge de trois ans ; déploiement du plan "Internat du XXIème siècle" (« véritable levier de justice sociale », avec pour objectif la création d'ici 2022 de cent résidences à thèmes, « dont au moins un établissement labellisé "internat d'excellence" par département en éducation prioritaire ») ; nouvelles orientations pour les Cordées de la réussite (dispositif « qui a vocation à doubler ») permettant d'assurer « un accompagnement continu de la classe de 4ème au baccalauréat et à l'enseignement supérieur. »
Tour de France
Ayant « commencé à la fin de l'été un Tour de France des territoires », forte de sa bonne connaissance « des spécificités du réseau Éducation prioritaire, pour avoir eu la chance d'enseigner notamment dans des quartiers prioritaires de la Ville dans le Val d'Oise », elle s'est déclarée « très attentive aux questions relatives à la lutte contre le non-recours aux prestations sociales, qu'il s'agisse des fonds sociaux ou des bourses. » A ce titre, elle portera aussi « un regard particulier à l'Allocation de rentrée scolaire que le gouvernement a augmentée de cent euros cette année. » Concernant « l'enjeu central qu'est le virage numérique », elle a rappelé que « le défi est immense, qu'il s'agisse de l'équipement des familles et des professeurs, de la formation nécessaire pour s'emparer de ces outils, ou encore des problématiques liées à la connexion au réseau internet. » Deux territoires, le Val d'Oise et l'Aisne, expérimentent à ce sujet « une nouvelle étape du Plan numérique pour des territoires numériques éducatifs ; avec volontarisme et discernement, nous mettons le numérique au service du progrès de tous les élèves équipés, formés, transformés. »
En outre, « si difficile soit-elle, la période du confinement [puis de grandes vacances, ndlr] a aussi été un révélateur de très belles énergies pour trouver des solutions, pour poursuivre l'accompagnement au quotidien des familles et faciliter le lien entre les élèves et leur école » : opérations "Vacances apprenantes" ou "École ouverte" (« ayant bénéficié à un million d'élèves ») ; dispositif "Nation apprenante" ; ressources pédagogiques sur Eduscol ou la plateforme du CNED (« utilisées par plus deux millions de familles et plus de 500 000 professeurs ») ; Cités éducatives, Stages de réussite ; mais aussi des « initiatives exceptionnelles, des solidarités remarquables qui se sont nouées sur le terrain »... Afin de « positionner les élèves et de renforcer l'aide qui leur est apportée », ont eu également lieu « pour la première fois des évaluations nationales en CP, CE1, sixième, seconde et CAP durant la première quinzaine du mois de septembre », tandis que « la mesure "Devoirs Faits" - un élève sur deux concerné en REP+ - a repris dès la première semaine de septembre, avec la possibilité dans certaines académies de l'effectuer à distance. »
Mise en réseau
Dans les faits, selon Nathalie Élimas, « nous ne pouvons attendre de l’École qu'elle lutte seule contre l'échec scolaire et les inégalités. » Ainsi, « la mise en réseau de tous les acteurs de terrain impliqués et le partage des bonnes pratiques permettront le développement ambitieux de ces projets éducatifs novateurs. » D'où l'intérêt, selon elle, « de la coéducation avec les familles et du lien avec les partenaires extérieurs : le renforcement des alliances éducatives et de toutes les formes de coopération, qui a été mené, doit être encore approfondi pour ne plus laisser aucun élève au bord du chemin. »
Pour conclure, la Secrétaire d’État a rappelé deux « chiffres éloquents. » D'abord, 40% des jeunes se retrouvaient en 1980 « ni en formation ni en emploi », contre « seulement 9% en 2020 ». Toutefois, « nous ne pouvons nous satisfaire du fait que 80 000 jeunes, dont 60 000 âgés de 16 à 18 ans quittent encore le système scolaire sans diplôme. » D'où l'obligation, annoncée par le Président de la République et entrée en vigueur à la rentrée 2020, de la formation des jeunes de 16 à 18 ans - « mesure forte de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté. »
Cette prise de parole volontariste trouvera tout naturellement un écho dans le discours de conclusion d'Eunice Mangado-Lunetta, Directrice des programmes de l'Afev, quand elle constatera que « deux heures ont été consacrées à parler du seul sujet qui nous importe à cette heure, dans une rentrée où on a beaucoup entendu parler de protocoles et de crise sanitaires : comment, dans un système éducatif qui peine déjà à faire réussir les plus fragiles, s'assurer que la partie la plus vulnérable de notre jeunesse n'est pas laissée sur le bord du chemin. »
François Perrin
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