Le confinement et les conditions du retour progressif en classe ont remis au centre des préoccupations la problématique du décrochage scolaire tout particulièrement sous l’angle du raccrochage de tous ceux dont le lien avec l’école se serait distendu voire rompu pendant cette période.
Le décrochage renvoie en effet à la fois une définition administrative – quitter le système de formation initiale après 16 ans sans qualification- et à un phénomène plus large. En termes de réalité vécue et de politique publique, il désigne un processus de perte d’engagement dans les apprentissages, d’intérêt pour l’Ecole, de rupture de liens avec les équipes éducatives, voir les camarades jusqu’à la déscolarisation.
La persévérance scolaire, notion qui nous vient du Canada est souvent liée dans nos représentations à la prévention du décrochage. Or elle est également au cœur du raccrochage. Elle correspond à la responsabilité partagée des équipes éducatives, des parents et des élèves et des partenaires de l’école et à une prise en compte globale du jeune afin de favoriser son engagement dans les apprentissages et son sentiment d’appartenance.
L’accrochage scolaire constitue un enjeu permanent pour les équipes éducatives des établissements scolaires puisqu’il est nécessaire d’agir dans la classe, développer des actions et des mesures spécifiques qui permettent aux élèves vulnérables et en risque de déscolarisation de les convaincre qu’ils ont toute leur place à l’école. Le développement de la coopération au sein des équipes éducatives et avec les parents- les alliances éducatives- constitue un axe structurant de la persévérance scolaire. L’aspect multiforme des causes du décrochage et donc des paramètres de prévention nécessite ces équipes pluri-professionnelles qui prennent appui sur les groupes de prévention du décrochage scolaire (GPDS) et intègrent des partenaires externes, tout particulièrement des associations –comme l’Afev engagée depuis longtemps dans cette démarche- et bien entendu les parents.
Il existe de multiples façons de contribuer à la persévérance. Quelques exemples très concrets peuvent l’illustrer. Dans la période spécifique du confinement, du retour progressif en classe, des points d’appui ont été identifiés par les équipes éducatives parmi lesquels de nouvelles modalités du lien et des relations avec les élèves et les familles, et le développement de la coopération entre pairs aussi bien au niveau des adultes que des élèves. Des pédagogiques innovantes ont été également expérimentées : classes inversées, articulation entre enseignements synchrone et asynchrone
Pour que le raccrochage soit possible, il est nécessaire que les causes du décrochage soient identifiées et surmontées. Il existe souvent un parcours de raccrochage. De la même façon que le décrochage correspond à une combinaison de multiples paramètres, la motivation au raccrochage est multiple. En outre de même que le jeune qui raccroche a changé, il est nécessaire que l’environnement évolue dans son regard et son accompagnement. Le mouvement doit avoir lieu de part et d’autre.
Le raccrochage constitue une réelle opportunité d’innovation, d’évolution aussi bien pour l’élève que pour l’Ecole. Pour le jeune, c’est l’occasion de restaurer sa confiance en lui et en l’institution, dédramatiser ses échecs, intégrer vraiment l’idée de deuxième chance. Pour le système éducatif, c’est une occasion d’évolution de ses pratiques, indispensable pour la prise en compte des vulnérabilités et utile pour l’ensemble des élèves.
Frédérique Weixler
Inspectrice générale de l’éducation, du sport et de la recherche
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