Grande Coop’ Jeunesse : un pari collectif à Cergy

La Grande Coop Jeunesse de Cergy, organisée par la Ville et le CEpep le 12 juin 2025, a réuni jeunes, professionnels et associations autour des "lieux tiers" et de l’engagement. Sollicitée dès l’amont par l’adjointe au maire déléguée à la jeunesse Cécile Escobar, l’Afev y a joué un rôle actif : Sandrine Martin, Directrice de la jeunesse et de l’enseignement supérieur au sein de l’association, a coanimé l’atelier sur l’engagement des jeunes et de leurs familles, et des volontaires Afev de Cergy ont été mis à l’honneur lors de la cérémonie de clôture. L’événement a aussi ouvert des perspectives de coopération avec la collectivité sur sa future politique jeunesse. Interview croisée entre Sandrine Martin et Malika Yebdri, Première adjointe au maire de Cergy, déléguée à la vie associative, à la culture et au patrimoine culturel.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de proposer cette journée de la Grande Coop’ Jeunesse à Cergy ?

Malika Yebdri : Cela faisait plusieurs années que nous étions, avec le maire de Cergy Jean-Paul Jandon, dans une dynamique de laboratoire sur les questions de jeunesse et de réussite éducative… mais sans forcément prendre le temps du recul. Nous avions donc besoin de croiser les regards des acteurs du territoire sur tout ce qui touche à la jeunesse, mais aussi de refonder notre manière de penser nos politiques publiques jeunesse. Et pour cela, il nous fallait dialoguer avec ceux qui sont concernés au premier chef : les jeunes eux-mêmes. Nous avions déjà mené une grande concertation il y a quelques années, mais cette journée avait pour ambition d’ouvrir un espace plus large, structurant, à l’interface entre les institutions, les acteurs associatifs et les jeunes. C’était un pari, mais surtout une nécessité pour réunir tout le monde pour avancer.

Pourquoi l’Afev et la mairie de Cergy ont-elles construit ensemble cette journée ?

Malika Yebdri : Parce que l’Afev est un partenaire solide du territoire depuis longtemps, qui est présente partout : à l’université, dans les maisons de quartier, au sein même des quartiers... Surtout, elle apporte un regard qui n’est pas le nôtre, mais qui croise le nôtre. Nous, élus, ne pouvons pas prétendre être les seuls experts de la jeunesse, et la production de politiques publiques ne peut pas se faire uniquement "par le haut". Il faut la construire avec des acteurs comme l’Afev, qui interviennent là où nous ne sommes pas, qui ont d’autres manières de faire, d’autres entrées. C’est ce croisement qui est fécond, et qui donne selon moi de la légitimité à l’action publique.

Sandrine Martin : Pour nous, à l’Afev, c’était une évidence : nous sommes partenaires de la Ville de Cergy depuis vingt ans. Or ici, être associé à cette journée ne consistait pas seulement à y participer, mais à la co-construire. Ce qui nous a été proposé, c’est d’apporter notre expertise - notamment sur les politiques jeunesse et les questions d’engagement - à une initiative collective. Cela nous intéressait évidemment. C’était aussi l’occasion de rencontrer d’autres partenaires, dont l’université, avec qui nous aimons beaucoup travailler, et de faire avancer ensemble des réflexions partagées sur des sujets essentiels. 

Je crois aussi que si la Ville a fait appel à nous, c’est parce que nous ne venions pas seulement avec une équipe locale, mais avec toute notre ingénierie nationale. Nous avons une vision et des savoir-faire, sur les questions d’engagement des jeunes, que nous développons développe dans nos plaidoyers, dans nos expérimentations sur d’autres territoires. Nous avons également proposé des intervenants - comme la professeure et spécialiste des politiques publiques de jeunesse Valérie Becquet, qui est intervenue le matin. Ce que l’Afev apporte, c’est aussi cette capacité à penser, à structurer, à relier les enjeux de terrain à des réflexions de fond. Et puis il est toujours précieux de pouvoir conseiller sur la façon de construire les contenus, les thématiques, les formats... Cela donne une autre envergure au partenariat.

Quelles sont les réflexions ou prises de parole que vous retenez particulièrement de cette journée ?

Malika Yebdri : Deux temps-forts me restent en tête. D’abord, les échanges avec les équipes pluridisciplinaires de l’université. C’était essentiel : nous avons une université brillante, mais qui peut aussi vivre comme un îlot un peu isolé. Ce jour-là, nous avons vu que les problématiques des institutions, des associations et de l’université étaient les mêmes. Cela a conforté notre intuition : nous devons objectiver nos difficultés et cesser de raisonner uniquement à partir de ressentis. Ensuite, les tables-rondes réunissant les acteurs municipaux, associatifs et universitaires ont été très vives, très denses. Et ont permis de démontrer que nous calons tous souvent aux mêmes endroits. Ainsi, la seule issue, c’est la coopération ! Car tout est une question de volonté, pas seulement de moyens.

Sandrine Martin : D’abord, il y avait beaucoup de monde, ce qui est déjà un bon signe. La diversité des acteurs présents était remarquable, et le format participatif très bien pensé. Il y avait des apports théoriques le matin, puis l’après-midi, trois ateliers sous forme de "World Cafés" autour de thématiques extrêmement pertinentes : la santé mentale, l’intelligence artificielle et l’engagement des jeunes. Ce sont des sujets qui touchent tout le monde, mais pour lesquels nous n’avons pas souvent le temps de prendre du recul. Or là, tout le monde a pu s’exprimer - il y a eu un vrai "bain commun", que j’ai trouvé précieux. Et puis le soir, il y avait un temps de valorisation du travail des jeunes engagés à Cergy, avec la participation de nos volontaires, bénévoles étudiants et lycéens. Cela a permis d’équilibrer la journée entre professionnels et jeunes. Peut-être un jour pourra-t-on faire les deux en même temps ? Mais c’était déjà très réussi.

Y aura-t-il une Grande Coop’ 2 ? Et quelles suites espérez-vous ?

Malika Yebdri : Ce que l’on a surtout constaté, c’est que cette journée était indispensable. Elle ne doit pas rester un événement isolé, et il faut absolument qu’elle sème des graines au long de l’année. Ce ne peut pas être un simple colloque annuel. Il faut que cela débouche sur des actes, sur des décisions, que l’on se donne des caps clairs. Peut-être pourrait-on imaginer un grand rendez-vous tous les deux ans, avec des jalons intermédiaires. Ce qui est sûr, c’est que l’on doit continuer. Et il est nécessaire que ce qui en ressorte irrigue nos politiques publiques. J’ai vu trop de dispositifs géniaux que l’on a laissés mourir sans s’interroger. Il faut que nous apprenions également à le dire, quand quelque chose ne fonctionne pas, et à faire en sorte de comprendre pourquoi. C’est comme cela qu’on avancera, ensemble, vers un vrai projet de territoire.

Sandrine Martin : Notre volonté est claire, nous souhaitons continuer à construire ensemble avec la Ville de Cergy. Pour nous, les enjeux sont multiples : engagement des jeunes, bien sûr, mais aussi logement, mobilité sociale, égalité des chances... Nous sommes prêts à faire des propositions, à travailler avec la collectivité et avec les autres partenaires. D’ailleurs, dès la fin de cette journée, nous avons évoqué des rendez-vous à venir - que ce soit avec la mairie ou avec l’université. Je pense en effet que c’est ce type de moments, denses et partagés, qui permettent de poser les bases de collaborations durables. Or, à Cergy, il existe un terreau très fertile pour cela.

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