Président de l'Observatoire de la Responsabilité sociétale des universités (ORSU) depuis son lancement en 2012, Camille Galap est un précurseur pour repenser la place et les missions des universités dans leurs territoires d'implantation. Cet ancien président de l'Université du Havre et de la Commission Vie étudiante de la CPU dresse un bilan des actions engagées et explique pourquoi la RSU doit être mieux reconnue, donc soutenue, par l'Etat.
Qu'est-ce qui vous a amené à vous engager en faveur de la RSU ?
Camille Galap : En tant que président d'université, j'ai découvert, sur place, les « extensions » mises en place par l'Université de Fortaleza, dans l'Etat du Céarà au Brésil. La forte sensibilisation des étudiants et personnels universitaires m'a marqué, ainsi que les interactions entre le campus et la favela qui la jouxtait. Il s'agit d'une réelle démarche citoyenne, bénéfique de part et d'autre, qui redéfinit totalement le rôle de l'Université sur son territoire : les gens des favelas retrouvaient l'envie de s'approcher d'un monde réputé inaccessible, tandis que les étudiants prenaient conscience du monde et des réalités qui les entouraient. J'ai eu alors la volonté de développer cela en France, où il existait de fait des actions menées par des universités qui faisaient déjà de la RSU sans le savoir... mais de moindre envergure car sans coordination ni visibilité réelle. Mon souhait était vif d'ouvrir l'Université à la population. Développer la citoyenneté des étudiants, les faire interagir sur leur territoire, c'est aussi l'une des missions de l'enseignement supérieur !
Comment est né l'ORSU ?
Camille Gallap : Après la mise en place notamment du service civique, il apparaissait utile de travailler avec la CPU, l'Afev, l’Unicef, l'ARF et l’AVUF pour identifier les politiques des universités, définir des outils pour reconnaître ce qui relève ou non de la RSU, et valoriser les actions au niveau national, afin de créer un effet boule-de-neige. A la suite d'un séminaire, en 2012, auquel ont participé des établissements et des entreprises, nous avons publié un manifeste, œuvré afin que la « Responsabilité Sociale des Etablissements » (RSE) entre dans le cadre de la loi Fioraso de 2013.
Cette question de la RSU parvient-elle aujourd'hui à s'imposer ?
Camille Gallap : Certains présidents d'université sont très impliqués, certains établissements très investis, comme Paris Ouest Nanterre la Défense, et on voit se multiplier des épiceries solidaires, jardins partagés, boutiques des sciences, etc. A chaque séminaire, nous mettons en valeur certaines de ces actions, et les participants repartent avec de nouvelles idées. Qu'il s'agisse d'accueil des étudiants en situation de handicap, de soutien scolaire, d'université populaire, tous ces projets entrent dans le cadre de la RSU. De manière générale, il s'agit de substituer une vision transversale entre acteurs, une gouvernance partagée à une logique de prés carrés. Pour mettre en place une RSU intelligente, il s'agit d’œuvrer sur cette gouvernance, de développer des outils de modélisation permettant à chaque environnement d'évaluer ses forces et faiblesses, pour ensuite développer un contrat d'objectifs pertinent en fonction du territoire. Et valoriser ensuite, bien entendu, les compétences sollicitées par les étudiants, par les personnels dans le cadre de la RSU – des compétences éminemment capitalisables par la suite. Plus généralement, la RSU doit être encore mieux reconnue par l'Etat, et bénéficier de financements pour pouvoir entretenir le plus longtemps possible cette nouvelle culture de l'interaction avec le territoire. Propos recueillis par François Perrin Contribution de l’ORSU
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