On a vu l’université partir à la conquête ces dernières décennies du grand marché de la connaissance : résultat d’une croissance jamais vue encore de la démographie des apprenants dans le monde, et de leur mobilité internationale. Le savoir ajoute donc de la valeur à l’économie marchande ?
C’était pourtant une sorte de lieu commun que de reconnaître une valeur d’échange à l’acquisition des connaissances. Et la plupart des sociétés humaines qui avait mis l’éducation au cœur de leur projet de développement, avait fait ce pari de l’intelligence collective, dans le savoir partagé.
Notre géographie urbaine actuelle de l’humanité nous pousse à aller plus loin : nos « big métropoles » seront forcement durables, solidaires, responsables si elles veulent demeurer des « sociétés humaines ».
Quand la responsabilité individuelle devient collective
Tout l’effet papillon est là : plus le niveau de connaissance des risques, des enjeux et du rôle de chacun dans notre développement humain sera connu et partagé, mieux chacun saura définir ses limites, ses contraintes, ses marges d’action individuelles et sociales. Dans ce jeu, où tout le monde gagne, il faudra aussi acquérir un savoir être ensemble, seule garantie de pérennité : la responsabilité individuelle dans la responsabilité collective. Nos systèmes d’acteurs, nos modes d’organisation du travail, d’acquisition des compétences, nos codes, nos rites de diplomation pourront alors être nos cadres de valeurs sociétaux. Et nos institutions, nos services publics les plus proches des citoyens que sont l’Université, les collectivités locales en seront forcement les médiateurs, les interfaces, moteurs, parfois. Ainsi, des initiatives ont déjà amené ces acteurs à travailler ensemble dans une perspective généralement économique : schéma de développement territorial, stratégie partagée de rayonnement international, de réussite professionnelle. Encore un effort ! Encore un pari d’intelligence collective !Les trois piliers de l’économique, de l’écologique et du social
Il manque un volet à ces modèles collaboratifs : l’intégration de la responsabilité sociétale dans notre conception du développement humain. En effet les trois piliers du développement durable sur lesquels repose la notion même, en équilibre, sont l’économique, l’écologique et le social. La responsabilité sociale est à la jointure entre le profit personnel et le bénéfice collectif ; dans une société vivable et équitable, où chacun doit pouvoir imaginer, trouver sa place et valoriser son potentiel. Ainsi la notion même d’ascenseur social ne peut se concevoir sans la dynamique, et la régulation des conditions d’accès au savoir, pour les plus démunis. La satisfaction des besoins « élémentaires » des étudiants pourrait rejoindre en France les standards des campus internationaux, notamment avec le Plan campus. Et, dans la pyramide de Maslow des besoins, tous les étudiants pourraient se loger, se nourrir, se soigner, en résumé, bénéficier de conditions matérielles correctes.Les conditions de la réussite en question
Cela ne suffira cependant pas à combler le manque de culture générale, les codes sociaux et comportementaux que les étudiants issus des milieux défavorisés n’auront jamais acquis. La réussite des étudiants dépend pour une bonne part de leur orientation, puis de leurs représentations économiques et sociales et enfin des conditions matérielles de réalisation des études supérieures. A chacune de ces étapes d’acquisition, d’apprentissage, la collectivité peut intervenir : accompagnement scolaire, information, préparation, développement des compétences, valorisation des aptitudes à travers le maillage associatif, l’accès aux entreprises, les plateformes de travail collaboratif... Tous les partenaires qui se sont engagés aux cotés des établissements d’enseignement supérieur ces dix dernières années dans des investissements économiques massifs, ont donc un nouveau challenge : celui de créer les conditions de l’insertion sociale et économique de tous les jeunes apprenants : les conditions de la réussite. Brigitte Régaldie, directrice territoriale, responsable du Service Université Recherche à la direction des Affaires Culturelles de la ville de Lyon Contribution ORSUPartager cet article