Alain Rousset : « Les jeunes, compétences premières des régions »

Alain Rousset, président de la région Aquitaine, met la jeunesse au cœur du débat politique.

Vous avez souhaité placer la question de la jeunesse au cœur de votre mandat. Pourquoi ce choix ?

Je considère que les jeunes constituent la compétence première des régions : lycées, apprentissage, formation, mobilités, les universités et l’insertion, ces problématiques sont au cœur de l’action des conseils régionaux. C’est un sentiment de responsabilité que nous avons, en tant qu’élus, pour cette tranche d’âge qui va de 14 à 25 ans et qui doit, sur son territoire grandir, s’orienter, se former et s’insérer. Je pense plus particulièrement aux jeunes des quartiers populaires pour qui l’accès à l’orientation, à la culture, aux nouvelles techniques de communication ou encore à l’apprentissage des langues étrangères sont tellement déterminants. C’est pour cela que nous mettons en avant l’idée d’un service public de l’orientation, de la formation et de l’emploi. Les régions seraient les pilotes de ce service public innovant en direction des jeunes qui ne consisterait pas à créer de nouvelles administrations, mais à essayer d’inventer des politiques. Leur but, lever les obstacles à la poursuite des études ou à la recherche de qualification. Logement, coût des études, filières de formations et emploi : nous voulons nous saisir de ces chantiers en mettant les jeunes au cœur des préoccupations des régions.

Que vous inspire l’engagement des jeunes ? Et plus particulièrement dans les quartiers populaires ?

Cela m’inspire avant tout un sentiment d’optimisme puisque c’est eux qui feront du monde d’aujourd’hui la société de demain. Si pour certains d’entre eux nous pouvons être inquiets, les actions d’accompagnement, de jeune à jeune, qui font tomber les barrières d’une relation professorale sont des réponses essentielles. Cela me rappelle d’ailleurs une initiative engagée depuis plus de 15 ans sur la commune de Pessac. A partir d’une idée originale émanant de mon équipe et avec le soutien d’étudiants réunis dans une association de juristes, nous avons mis en place une maison des services publics : la Plateforme des services au public, devenue ensuite « Maison du Droit ». La présence de l’université a permis que des étudiants se mobilisent bénévolement avec un résultat très positif. Favoriser l’engagement des jeunes, dans un esprit de mixité sociale, cela suppose que l’on puisse avoir une action structurelle avec les communes, pour changer l’urbanisme des cités afin qu’elles s’ouvrent sur la ville. Il faut y remettre du service public et en premier lieu celui de l’orientation et de l’information. Enfin, le dernier enjeu est de créer des dispositifs qui permettent de mettre ensemble deux jeunesses (les étudiants et les jeunes des quartiers populaires) et de les croiser.

Avec l’expérimentation des KAPS, l’Afev a ouvert un nouveau chantier en liant la cohabitation de jeunes avec un projet de solidarité. Quel est votre point de vue sur ce genre de dispositif ?

Tout d’abord il faut souligner que le logement est notamment un problème auquel l’organisation administrative de notre pays a du mal à répondre. Les arbitrages se faisant au niveau de l’Etat, avec des processus lourds … quand il faut prendre une décision, il n’y a souvent plus de pilote ! C’est pour cela qu’il faut que l’Acte 3 de la décentralisation détermine qui dirige la politique publique. Concernant l’emploi et le logement, les deux préoccupations principales des jeunes, il y a clairement un problème de pilotage de l’action publique. Les régions se sont engagées dans des actions volontaristes pour le logement de jeunes : étudiants, apprentis, jeunes travailleurs, mais cette mobilisation extrêmement forte doit être soutenue par des ressources dynamiques. La question de la cohabitation est un bon exemple : nous avons ouvert des cités étudiantes pendant l’été, pour des travailleurs saisonniers, pour les jeunes travailleurs ou encore pour les jeunes en alternance. Ceux-ci se mêlant donc à des étudiants qui y habitent parfois à l’année. Nous devons trouver d’autres dispositifs similaires afin de mixer les publics. Pour autant, on n’offrira pas de solution au logement des jeunes s’il n’y a pas un effort de construction important. Au-delà, il faut pouvoir leur en garantir l’accès, pour que l’autonomie d’un jeune ne soit pas freinée pour des raisons financières. C’est le sens du dispositif Clé Aquitaine, une aide à la caution locative et au dépôt de garantie pour les jeunes, lancé dans ma région avec un taux d’échec dérisoire. Enfin, la réussite de l’expérimentation KAPS montre bien qu’il y a quelques éléments clés qui doivent nous orienter : la relation de confiance, le réseau local et la proximité.

© PHOTO LARTIGUE STEPHANE

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